Trois questions sur les traitements de fond

Les traitements de fond sont un enjeu considérable dans la sclérose en plaques. Quels sont leurs intérêts ? Comment les choisir ? Quels sont les freins des patients ?
Le Dr Marc Coustans, neurologue, répond à ces questions en prenant en compte le point de vue des patients.

Quels sont les intérêts d’avoir un traitement de fond ?

Pour la sclérose en plaques récurrente rémittente, on assiste à l’arrivée de nouveaux traitements depuis 10 ans. Ils ont trois objectifs : baisser la fréquence des poussées, diminuer le risque d’handicap après une poussée et diminuer la survenue de nouvelles lésions sur l'IRM encéphalique et médullaire.

Aujourd'hui, on estime que le traitement doit être mis en place précocement1, dès que le diagnostic est posé.

L'objectif est de bloquer le processus inflammatoire au plus tôt et sur une période prolongée. Pour cela, nous disposons d'une gamme de traitement large et nous pouvons changer facilement de traitement de fond s'il y a une mauvaise tolérance.

Pour la forme progressive primaire, il n'y a pas de molécule disponible en France. Cette forme concerne 15% des patients pour lesquels nous pouvons proposer des traitements symptomatiques et une prise en charge rééducative. La recherche se concentre sur la forme progressive depuis quelques années.

Comment choisir son traitement de fond ?

Le traitement de fond doit être un compagnon de route mais pas un ennemi. Nous devons choisir le bon traitement pour le bon patient : il doit être bien supporté, bien pris et être efficace. C'est donc une discussion à deux, entre le patient et le neurologue, et c'est le patient qui choisit finalement.

Nous avons de plus en plus de molécules dans les traitements mais aussi de modes d'administration différents, ce qui permet de s'adapter à la vie des patients.
Rien n'est scellé : s'il est mal toléré, on reste dans la même gamme thérapeutique. S'il n'est pas, ou pas assez efficace, on passe à un traitement de seconde ligne plus puissant. Il faut être en confiance avec son neurologue pour en parler.

Les neurologues peuvent facilement mettre en place un traitement dit de première ligne chez les patients qui débutent leur maladie. Si la maladie est très active ou inflammatoire, on passe à un traitement de seconde ligne, c'est parfois une décision collégiale, prise en concertation avec d'autres neurologues. Pour certaines décisions thérapeutiques, on peut avoir l'appui d'un centre de référence, dit Centre Ressources et Compétence, et en discuter avec des experts de la SEP, cela se fait couramment partout en France.

L'éducation thérapeutique du patient est indispensable : l'infirmière apporte un discours complémentaire à celui du médecin. C'est du "plus" pour les patients, qui peuvent aussi discuter entre eux.

Quelles raisons expliquent un refus de traitement ?

Quand un patient refuse le traitement, il ne faut pas le brusquer : il doit s’approprier le diagnostic au début de la maladie. Il faut le revoir après un peu de temps et rediscuter.

Comme freins principaux, il y a la peur des effets secondaires. En effet, il faut les expliquer et les décrire mais aussi rassurer le patient : ils ne sont pas systématiques et s'il y en a, les équipes sauront faire face.... Autre frein, le fait d'aller bien ! On explique alors que l'on traite pour le futur, pour diminuer le risque d’handicap dans 20 ou 30 ans. C'est une sécurité.

Le manque de recul peut aussi être évoqué, mais nous avons plus de 20 ans de recul sur les premiers traitements par injection et plus de 8 ans sur les formes orales par comprimé.

Le projet de grossesse est également un frein, mais on s'adapte dans ce cas-là : en fonction de la situation clinique et du désir de la patiente pour proposer une prise en charge et un suivi médical et thérapeutique adaptés2.

Même si le patient n'accepte pas de traitement, il faut un suivi clinique et radiologique, en sachant que l'IRM est beaucoup plus sensible que la clinique. C'est un marqueur évolutif3 sensible car il y a plus de lésions que de symptômes cliniques. Lorsque le patient voit son IRM progresser, cela peut être un déclencheur pour prendre un traitement de fond. Ce qui est certain, c'est que moins on cumule de lésions au début de la maladie, moins on a de handicap à long terme.

Pour aller plus loin

Sources :

  1. Edan et all.Evidence for a two-stage disability progression in multiple sclerosis. Brain 2010. doi:10.1093/brain/awq076 https://www.incr.fr/wp-content/uploads/2012/08/brain-2010-leray-1900-13.pdf

  2. Recommandations française de la SFSEP

  3. Cohen. Valeur pronostique de l'IRM. Journal du neurologue 2010. https://www.edimark.fr/Front/frontpost/getfiles/16759.pdf

Liens :



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