Les autosondages urinaires en pratique

La sclérose en plaques entraîne couramment des troubles urinaires. Les envies peuvent alors devenir fréquentes, voire urgentes. À l’inverse, il est possible d’éprouver des difficultés à uriner. Dans les deux cas, le recours aux autosondages peut devenir nécessaire pour assurer une bonne vidange régulière de la vessie. Après un apprentissage de la technique, les autosondages deviennent plutôt faciles et rapides à réaliser. Ils améliorent alors grandement la qualité de vie. Voici tout ce qu’il faut savoir sur les autosondages urinaires, avec le Dr Cécile Donzé, chef du service de Médecine physique et réadaptation fonctionnelle de l’hôpital Saint-Philibert à Lille.

Qu’est-ce qu’un autosondage urinaire ?

Une technique pour vider sa vessie

Un autosondage est un procédé qui permet de vider sa vessie de façon mécanique quand cette dernière ne fonctionne plus correctement de manière naturelle. Il consiste à introduire dans l’urètre, le canal qui permet d’évacuer l’urine, un fin tuyau (une sonde) jusque dans la vessie. Celle-ci se vide alors automatiquement. L’urine coule à travers la sonde et sort à son embout, soit directement dans les toilettes, soit dans une poche.(1,2)

Effectués à intervalle régulier au cours de la journée, les autosondages permettent de retrouver un fonctionnement quasi normal de la vessie, ainsi que d’éviter les possibles complications de la rétention urinaire ou les désagréments de l’hyperactivité vésicale (fuites urinaires notamment).(1,2)

À qui s’adressent les autosondages urinaires ?

Les autosondages urinaires deviennent nécessaires en cas de troubles urinaires liés à la sclérose en plaques. Ces troubles se traduisent principalement par :

  • Des envies impérieuses (urgenturie) ;
  • Des envies très fréquentes le jour (pollakurie) comme la nuit (nycturie) ;
  • Des difficultés à uriner ;
  • Des fuites urinaires, voire une incontinence(3).

Ces différentes conséquences des troubles urinaires peuvent se manifester de façon isolée ou conjointe (par exemple des envies très fréquentes associées à des difficultés à vider sa vessie)(3).

Lorsque la vessie est hyperactive, il est fréquent qu’un traitement soit prescrit, soit par voie orale, soit par injection dans la vessie, pour réduire ou bloquer les contractions vésicales incontrôlées. Le recours aux autosondages est alors indispensable puisque la vessie ne se contracte plus ou insuffisamment pour se vider complètement(2).

En cas de dysurie, c’est-à-dire de difficultés à uriner, les autosondages permettent de vider régulièrement la vessie et ainsi d’éviter la rétention urinaire(2).

Les bénéfices des autosondages

Le premier bénéfice des autosondages est de pouvoir vider correctement sa vessie et d’en retrouver un usage normal. Les envies fréquentes et/ou urgentes disparaissent. La dysurie ne pose plus de problème.

Les autosondages permettent également de limiter les infections urinaires. En effet, la rétention d’urine dans la vessie augmente le risque de survenue de telles infections. En permettant une vidange régulière de la vessie, les germes éventuellement présents sont plus facilement évacués, réduisant le risque d’infections(1).

Les infections pouvant avoir des conséquences néfastes pour les reins, la pratique régulière des autosondages permet de plus de préserver ces derniers(1).

Globalement, les autosondages améliorent la qualité de vie des personnes souffrant de troubles urinaires liés à la SEP(2). « Quand je commence à leur parler d’autosondages, mes patients me détestent tous, raconte le Dr Cécile Donzé. Ils expriment d’emblée une réticence, ce qui est normal dans la mesure où il ne s’agit pas d’un geste naturel. Cependant, une fois la période d’apprentissage terminée, ils sont systématiquement ravis. Ils me disent tous qu’ils auraient dû le faire bien avant, car cela change véritablement leur vie. Le bénéfice est vraiment important. »

Comment réaliser un autosondage urinaire

La réalisation d’un autosondage urinaire se déroule en plusieurs étapes.

Le matériel nécessaire

Il existe différents types de sondes pour réaliser un autosondage. À l’heure actuelle, les sondes recommandées et les plus utilisées sont à usage unique (elles ne servent qu’une fois) et sont lubrifiées (pour faciliter le passage dans l’urètre jusqu’à la vessie)(2).

Elles se présentent sous la forme d’un fin tuyau en plastique, comprenant une extrémité arrondie d’un côté (celle qui est introduite dans la vessie) et l’autre évasée pour permettre l’évacuation de l’urine. Cette seconde extrémité comporte généralement un dispositif permettant de tenir la sonde avec la main, sans toucher la partie qui est insérée dans l’urètre.

Il existe des sondes de différentes longueurs et diamètres. Pour les femmes, dont l’urètre est plus court que chez l’homme, la longueur est généralement comprise entre 7 cm et 20 cm. Les sondes utilisées par les hommes font en moyenne 40 cm de long. Le diamètre des sondes est fin pour faciliter le passage dans l’urètre. Ce diamètre est exprimé en charrières (CH), une unité correspondant à 1/3 de millimètre. Il varie de 4 à 26 CH, soit de 1,3 mm à 8,6 mm, sachant que le calibre de l’urètre fait de 3 à 8 mm. Pour une personne donnée, le diamètre est déterminé en fonction de la physionomie de son méat urinaire(1).

Les sondes urinaires pour autosondages sont disponibles dans les pharmacies de ville, sur prescription médicale. Des sociétés de services proposent la livraison à domicile avec un renouvellement automatique du stock de sondes(2).

La préparation

L’autosondage est généralement réalisé dans des toilettes. Il peut être pratiqué dans tout endroit préservant l’intimité, une chambre par exemple. Dans un premier temps, il faut se laver soigneusement les mains.

Pour les femmes, il est conseillé de s’asseoir, soit directement sur les toilettes, soit sur une chaise ou un lit par exemple. Les hommes peuvent rester debout face aux toilettes ou s’asseoir dessus.

Les personnes qui rencontrent des difficultés de mobilités peuvent réaliser l’autosondage dans leur fauteuil. Elles ont alors besoin de disposer d’une poche pour recueillir l’urine.

Il est conseillé de procéder à une toilette intime une à deux fois par jour. Il n’est pas nécessaire pour cela d’utiliser un antiseptique. L’autosondage est un geste propre mais pas stérile(1,2).

L’introduction de la sonde

Pour les femmes, il est nécessaire tout d’abord de dégager le méat urinaire en écartant les lèvres de la vulve d’une main. De l’autre main, en tenant l’embout adéquat, il faut alors introduire doucement la sonde dans le méat, puis remonter, tout aussi doucement, l’urètre. Quand la sonde parvient dans la vessie, l’urine se met immédiatement à couler.

Les hommes doivent dans un premier temps tenir leur verge orientée vers le haut et, en appuyant sur le gland d’une main, ouvrir le méat urinaire. De l’autre main, ils introduisent doucement la sonde dans le méat, puis le long l’urètre, jusqu’à ce que l’urine s’écoule, ce qui indique qu’elle est parvenue dans la vessie.

Si la personne est assise sur les toilettes ou, pour les hommes, est debout, l’urine peut s’écouler directement dans la cuvette. Dans les autres situations, il faut prévoir de raccorder au préalable une poche à la sonde qui recueille alors l’urine(2).

Le retrait de la sonde

La sonde doit être laissée en place jusqu’à évacuation complète de l’urine de la vessie. Il est alors conseillé de retirer légèrement la sonde pour qu’elle descende un peu dans la vessie et d’appuyer légèrement avec la main sur le bas ventre afin d’évacuer un éventuel résidu.

Ensuite, la sonde est retirée délicatement jusqu’à sa sortie complète. Elle doit alors être jetée à la poubelle.

Un nouveau lavage des mains est conseillé(2).

La règle des 4

« La réalisation des autosondages doit s’effectuer en respectant la règle des 4 », précise le Dr Cécile Donzé :

  • Pas plus de 4 heures entre deux autosondages (sauf la nuit) ;
  • Pas plus de 400 ml d’urine évacuée à chaque sondage ;
  • Pas moins de 4 autosondages par jour.

En général, il est conseillé de pratiquer 5 à 6 autosondages tous les jours pour s’assurer d’une bonne vidange de la vessie et limiter le risque d’infections urinaires. Il faut prévoir un autosondage le soir, juste avant le coucher, afin de pouvoir passer une nuit tranquille(1,2).

L’apprentissage de la technique de l’autosondage

L’autosondage n’étant pas un geste naturel, il nécessite un apprentissage. Les services de médecine physique et de réadaptation, ainsi que ceux de neurologie ou d’urologie proposent aux patients qu’ils prennent en charge, lorsque l’autosondage devient nécessaire, des séances d’éducation thérapeutique(2).

La durée et le format de cette éducation dépendent des services. En général, il est proposé une hospitalisation pendant quelques jours. Une infirmière spécialisée assure la formation, entourée par une équipe multidisciplinaire(2).

L’éducation a pour objectif dans un premier temps de permettre aux patients de bien comprendre leur anatomie et le fonctionnement de la vessie. Puis de montrer le matériel à utiliser et de procéder à l’apprentissage de l’autosondage lui-même. Ce dernier est réalisé par le patient lui-même, plusieurs fois par jour(2).

« Il est indispensable qu’un suivi à domicile soit ensuite mis en place, explique le Dr Cécile Donzé, soit avec une infirmière d’un réseau SEP, soit avec une infirmière libérale. Quand le patient se retrouve chez lui, dans un environnement qui n’est pas forcément aussi bien adapté qu’à l’hôpital, il peut rencontrer au départ quelques difficultés. L’évaluation de l’infirmière à son domicile permet de lever ces difficultés, de s’assurer que le patient a bien assimilé le geste, et, si nécessaire, le rassurer. »

Question/réponse sur l’autosondage urinaire

L’autosondage fait-il mal ?

« C’est une inquiétude très fréquente, explique le Dr Cécile Donzé. Normalement, l’autosondage est totalement indolore. Sauf éventuellement en cas de gestes un peu brutaux ou trop rapides. Dans ce cas, il faut essayer de se détendre et recommencer l’autosondage. »

L’autosondage présente-t-il des risques ?

Les risques liés à l’autosondage sont rares et d’autant plus que la technique apprise est bien suivie(2).

La principale complication de l’autosondage est d’entraîner une infection. C’est pour cela que le lavage préalable des mains est indispensable. Par ailleurs, si la sonde touche quoi que ce soit (le bord des toilettes et de l’évier) avant d’être introduite dans l’urètre, il est préférable de la jeter et d’en utiliser une autre.

Il peut se produire de petits saignements si le geste n’est pas réalisé de façon conforme(1,2).

L’autosondage présente-t-il des risques ?

Certaines personnes peuvent rencontrer des difficultés à pratiquer des autosondages. Ce peut être un blocage psychologique, compte tenu de la nature du geste. Elles peuvent également avoir des difficultés à faire remonter la sonde jusqu’à la vessie. Chez l’homme, le passage de la prostate est ainsi parfois laborieux(2).

Dans tous les cas, quelle que soit la difficulté rencontrée, il faut prendre contact avec l’infirmière qui a réalisé l’apprentissage de l’autosondage. Celle-ci procédera à une évaluation du problème et orientera vers la solution la plus adéquate.

Le matériel d’autosondage est-il pris en charge par l’assurance maladie ?

La sclérose en plaques fait partie des affections de longue durée (ALD) qui donne droit à une prise en charge à 100% par l’assurance maladie. Cette prise en charge concerne le matériel nécessaire pour pratiquer les autosondages(2).

En conclusion

« L’autosondage est une technique qui rend vraiment service à beaucoup de patients dans leur vie quotidienne, explique le Dr Cécile Donzé. À condition que l’apprentissage soit réalisé dans de bonnes conditions, c’est un geste qui devient généralement simple et rapide. »

Sources bibliographiques

1. Tixier F, Carré E. Les sondes urinaires vésicales. Le Moniteur Hospitalier. 2014;265:27-39.

2. SOFMER. Éducation thérapeutique du patient aux autosondages (ETP-AS). Guide Méthodologique. 2009.

Publié le : 23/11/2019 Mis à jour le : 03/12/2019

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