Troubles urinaires
et sclérose en plaques

Les troubles urinaires sont fréquents au cours de la sclérose en plaques (SEP). Ils se traduisent notamment par des envies fréquentes et impérieuses, ainsi que par des difficultés à uriner. Il existe des traitements efficaces contre ces troubles.

Les lésions démyélinisantes de la sclérose en plaques sont susceptibles d’altérer les commandes de la miction et donc d’entraîner des troubles urinaires. Ceux-ci sont fréquents au cours de la maladie. Mais il existe des moyens de les traiter et d’améliorer le confort de vie dans la grande majorité des cas. Le point sur ces troubles avec le Dr Cécile Donzé, chef du service de Médecine physique et réadaptation fonctionnelle de l’hôpital Saint-Philibert à Lille.

Les différents types de troubles urinaires associés à la SEP

La vessie est comme un réservoir. Elle recueille les urines produites par les reins et, quand elle est pleine, elle envoie un message au cerveau pour lui indiquer qu’il est temps d’aller aux toilettes. L’ouverture et la fermeture de la vessie sont contrôlées par un muscle situé à sa base, le sphincter.

Les commandes de la vessie et du sphincter sont situées dans le cerveau et la moelle épinière. Lorsque des plaques de démyélinisation apparaissent au niveau de ces commandes, les messages passent moins bien entre la vessie, le sphincter et le cerveau. Cela entraîne des perturbations du fonctionnement de la miction, appelées troubles vésico-sphinctériens, ou plus simplement troubles urinaires.

Il existe trois principaux troubles urinaires qui peuvent survenir au cours de la maladie, de façon isolés ou concomitants.

L'hyperactivité vésicale

C’est le trouble le plus fréquent. Il se traduit par des envies très fréquentes d’uriner (plus de huit fois dans la journée) et souvent de façon impérieuse 1. Il est alors indispensable de se rendre immédiatement aux toilettes, au risque sinon d’avoir des fuites.

Cette hyperactivité survient lorsque la vessie est trop sensible ou irritée, et qu’elle envoie au cerveau des messages erronés ; c’est une vessie énervée en quelque sorte. Même si elle contient peu d’urines, elle provoque le besoin impératif de la vider.

La dysurie

Ce trouble se caractérise par des difficultés à uriner. Lorsque l’on se rend aux toilettes, la miction est lente à démarrer, il faut parfois pousser pour la débuter et la maintenir. La miction peut être hachée (elle s’interrompt avant de reprendre) et le jet est faible. À la fin, il est possible d’avoir la sensation de ne pas avoir entièrement vidé sa vessie, conduisant à devoir retourner aux toilettes dans les minutes qui suivent1.

La dysurie peut s’accompagner d’une rétention urinaire, c’est-à-dire la présence permanente d’une quantité variable d’urines dans la vessie (ce que l’on appelle un résidu). Cette rétention peut être une source d’infections1.

Ce trouble survient quand la vessie devient moins sensible. Elle se contracte moins bien que la normale.

La dyssynergie vésico-sphinctérienne

Il s’agit d’un défaut de coordination entre la vessie et le sphincter. La première, parce qu’elle est ou croit être remplie, envoie le signal indiquant qu’il est temps d’aller aux toilettes. Mais le second ne se relâche pas et empêche d’uriner (1).

Les principaux symptômes des troubles urinaires

Les troubles urinaires survenant au cours de la maladie peuvent ainsi entraîner :
- Des envies impérieuses (urgenturie) ;
- Des envies très fréquentes le jour (pollakiurie) comme la nuit (nycturie) ;
- Des difficultés à uriner ;
- Des fuites urinaires, voire une incontinence.

Les envies impérieuses et fréquentes sont souvent associées. Mais il est possible d’avoir à la fois de telles envies tout en rencontrant des difficultés à vider sa vessie1

Quelle est la fréquence des troubles urinaires liés à la SEP ?

Les troubles urinaires sont très fréquents au cours de la maladie. Environ 80% à 90% des personnes atteintes d’une sclérose en plaques présentent ce type de troubles1

Les troubles urinaires peuvent survenir lors de poussées. Dans environ 10% des cas, il s’agit des premiers symptômes de la SEP. Le plus souvent toutefois, ils s’installent progressivement au fur et à mesure de l’évolution de la maladie1.

Ces troubles concernent autant les hommes que femmes.

Il faut toutefois savoir que ces troubles peuvent avoir, en plus de la SEP, d’autres causes qui les accentuent. Ainsi, chez les hommes, à partir de 50 ans, la prostate peut augmenter de volume. Elle exerce ainsi davantage de pression sur l’urètre et la vessie, perturbant alors la miction. Chez les femmes, un relâchement du périnée est fréquent après une grossesse et un accouchement, avec un risque de fuites urinaires1.

Les examens nécessaires en cas de troubles urinaires

Différents examens doivent être réalisés pour préciser le diagnostic des troubles urinaires qui peuvent survenir au cours de la maladie. Connaître le type précis des troubles permet en effet de déterminer quel traitement est nécessaire.

L’échographie

Cet examen indolore permet de visualiser la vessie et les reins. Il est utile pour repérer d’éventuelle anomalie de fonctionnement. Il sert également à voir si un résidu urinaire est présent dans la vessie. Pour cela, le volume d’urines dans la vessie est mesuré avant et après une miction.

Le bilan urodynamique

Cet examen consiste à effectuer différentes mesures des volumes, des pressions et des débits au niveau de la vessie et du sphincter, afin d’identifier les troubles du fonctionnement de ceux-ci1.

Le bilan nécessite environ 45 minutes et se déroule en trois étapes principales :

- La débimétrie. Il s’agit d’uriner dans des toilettes spéciales qui enregistrent la puissance du jet et le volume des urines.

- La cystomanométrie. Elle consiste à mesurer la pression au sein de la vessie pendant qu’elle se remplie. Pour cela, une très fine sonde est introduite par le méat urinaire. Cette sonde permet de remplir la vessie avec de l’eau stérile, tout en enregistrant la pression. Cet examen n’est pas douloureux, mais peut être désagréable.

- La profilométrie urétrale. Elle vise à analyser le fonctionnement du sphincter, pendant que la sonde est progressivement retirée.

En complément à ces examens, il peut être demandé de tenir un « calendrier mictionnel ». Cela consiste à noter pendant un ou deux jours différentes données sur les mictions (fréquence, durée, volume estimé, facilité) et sur les éventuelles fuites survenues. Ce « calendrier » permet de préciser l’intensité des troubles1.

Lorsqu’une infection urinaire est soupçonnée, par exemple en cas d’urines fortement malodorantes ou troubles, un examen bactériologique des urines (ECBU) peut être également prescrit. Cet examen est réalisé par un laboratoire d’analyse à partir d’un échantillon d’urines1.

Comment sont traités les troubles urinaires liés à la SEP ?

Le ou les traitements nécessaires sont déterminés en fonction du type de trouble urinaire. Les différents traitements disponibles sont généralement efficaces et permettent d’améliorer sensiblement la qualité de vie.

Il est donc essentiel de parler à son neurologue de ses troubles urinaires, même s’ils sont encore minimes. Des solutions peuvent en effet être proposées.

Le traitement par médicaments

Il existe une famille de médicaments qui permettent de diminuer les contractions de la vessie en cas d’hyperactivité de celle-ci. Ces médicaments se prennent essentiellement par voie orale, une à plusieurs fois par jour2.

D’autres médicaments sont efficaces contre la dysurie. Ils agissent en relaxant les fibres musculaires de la vessie et du sphincter2.

La rééducation périnéale

Une rééducation périnéale peut être proposée pour renforcer le périnée et favoriser le contrôle de la miction. Cette rééducation repose sur des exercices musculaires et/ou l’utilisation d’un appareil de stimulation électrique2.

Les auto-sondages

En cas de rétention urinaire importante, il est nécessaire de pratiquer des auto-sondages. Cela consiste à introduire soi-même une très fine sonde par le méat urinaire jusqu’à la vessie afin de permettre de vider celle-ci. Un court apprentissage est nécessaire pour bien réaliser les auto-sondages. Ceux-ci se pratiquent ensuite aisément et rapidement, avec des précautions d’hygiène (sonde à usage unique, lavage des mains, toilette du méat urétral à l’eau savonneuse ou lingette nettoyante non alcoolisée). Le nombre d’auto-sondages à réaliser par jour est déterminé au cas par cas2. L’intérêt des auto-sondages est largement établi dans la SEP tant sur le plan de sécurité uronéphrologique que sur celui de la qualité de vie.

Conseils pratiques pour limiter les troubles urinaires liés à la SEP

En plus du traitement, certaines précautions sont conseillées dans la vie quotidienne afin de ne pas favoriser les troubles urinaires :

- Boire suffisamment mais pas trop. Il est recommandé de boire environ 1,5 litre par jour, tous liquides confondus. Plus l’hydratation est importante, plus le besoin de miction l’est également.

- Limiter les liquides le soir. Après 19h30, il est conseillé de boire le moins possible de liquide afin de moins risquer des réveils répétés au cours de la nuit pour aller aux toilettes. Il est ainsi préférable d’éviter la soupe au dîner ou la tisane au cours de la soirée.

- Eviter certaines boissons. Le thé, le café et les eaux gazeuses tendent à exciter la vessie. C’est également le cas des épices. Il est donc conseillé d’en avoir une consommation très modérée.

- Aller aux toilettes très régulièrement. Il est recommandé d’uriner à intervalle régulier, toutes les deux ou trois heures, même en l’absence d’envie.

Sources bibliographiques

1. De Sèze M. Troubles sphinctériens. Brochet B, Sèze JD, Lebrun-Frenay C., Zéphir H. La sclérose en plaques - Clinique et thérapeutique. Elsevier Masson, 2017.
2. De Sèze M. Traitement des symptômes, troubles vésicosphinctériens et sexuels. Brochet B, Sèze JD, Lebrun-Frenay C., Zéphir H. La sclérose en plaques - Clinique et thérapeutique. Elsevier Masson, 2017.

Publié le : 20/06/2019

Restez informé

Chaque mois, un compte rendu
de l’actu Sep-Ensemble dans votre boite mail.