Hormones sexuelles : quel impact sur la sclérose en plaques ?

La sclérose en plaques touche davantage les femmes que les hommes. Le rôle des hormones sexuelles n'est pas encore totalement élucidé. Règles, grossesse, contraception, ménopause et andropause, le point sur les connaissances.

En 2022, les connaissances s'affinent sur les hormones sexuelles mais elles sont loin d'être élucidées...

"Il existe une double inégalité entre hommes et femmes dans la SEP", constate le Pr Sandra Vukusic, neurologue. "La première concerne la fréquence de la maladie qui touche 3 femmes pour 1 homme1. La seconde intéresse le pronostic, qui semble plus grave chez les hommes2 que chez les femmes. Il faut savoir pourquoi la maladie est plus fréquente et moins grave chez le sexe féminin."

Puberté et grossesse, le boom des hormones féminines

Les hormones féminines (estrogènes et progestérone) et masculines (comme la testostérone) s'expriment pleinement lors de la puberté.

"Avant la puberté, le sex ratio de la maladie est à peu près égal entre les garçons et les filles1", détaille la neurologue. "C'est le premier élément qui nous fait penser que les hormones jouent un rôle, car c’est à partir de la puberté que la prédominance féminine apparait. De plus, durant la grossesse, où l'imprégnation hormonale est très importante, il y a moins d'activité inflammatoire ; et davantage d'activité après l'accouchement1."

Les poussées semblent donc à l'inverse de l'imprégnation hormonale en estrogènes et progestérone. Ce qui soulève 2 questions pour la neurologue :

Est-ce que les hormones sexuelles, à des taux très importants, jouent un rôle sur le risque de poussées ? Les hormones pourraient-elles être utilisées en postpartum et être une piste thérapeutique de traitements de la SEP ?

"Une étude franco-italienne3 n’a pas montré d’effet bénéfique d’un traitement principalement progestatif pris juste après l’accouchement sur le risque de poussée du post-partum", précise Sandra Vukusic. "Dans le cadre de procréation médicalement assistée, le risque de poussées augmente aussi dans les 2 ou 3 mois suivant une stimulation1. Comme aujourd'hui nous proposons des PMA sous traitements de fond, ce risque diminue franchement."

Pour la neurologue, cela valide l'hypothèse de l'effet des hormones sexuelles féminines sur le cours de la maladie."

Quel impact des règles, de la contraception et de la ménopause ?

"Il n'y pas d'association entre la contraception hormonale ou les règles, et le risque de poussées1", reprend le Dr Vukusic. "Mais il y a une fluctuation des symptômes avec les règles : les patientes ressentent les symptômes de SEP plus fort."

Si après l'accouchement, la chute d'hormones est brutale, à la ménopause elle est lente et progressive.

"Elle n'a pas d'impact sur l'inflammation", confirme le Dr Vukusic. "Toutefois, les patientes ressentent davantage de symptômes, SEP et ménopause provoquant des troubles similaires comme la fatigue, les troubles urinaires ou les douleurs articulaires. Mais ce n'est pas une poussée (le taux de poussées diminue même après la ménopause1) et quand on donne un traitement hormonal substitutif, cela améliore les symptômes."

Des études sont en cours pour vérifier si le fait d'être ménopausée accentue ou pas la progression de la maladie.

Et les hommes ?

Les hommes2 ont des poussées un peu moins souvent mais avec une plus faible récupération. L’accumulation du handicap est également un peu plus rapide que chez les femmes.

"D'après certaines études, la SEP serait plus fréquente chez les hommes avec une insuffisance androgénique, une carence en testostérone", détaille Sandra Vukusic4.

La testostérone a-t-elle des effets sur la protection neuronale ou la remyélinisation... ? Il faudra encore un peu de patience pour le savoir, les essais cliniques évaluant une supplémentation en testostérone n'ayant pas encore livré leurs résultats...

Pour aller plus loin


Sources bibliographiques

  • 1 Sex effects across the lifespan in women with multiple sclerosis.
    Ther Adv Neurol Disord. 2020, Vol. 13: 1–30. doi : 10.1177/1756286420936166
  • 2 Ysrraelit MC and Correale J (2021). Impact of Andropause on Multiple Sclerosis.
    Front. Neurol. 12:766308. doi : 10.3389/fneur.2021.766308
  • 3 Vukusic S et al. Oral nomegestrol acetate and transdermal 17-beta-estradiol for preventing post-
    partum relapses in multiple sclerosis: The POPARTMUS study. Mult Scler. 2021 Aug;27(9):1458-1463. doi : 10.1177/1352458520978218
  • 4 M. El-Etr, Hormones sexuelles et sclérose en plaques.
    Médecine & Longévité (2009) 1, 3—11 doi : 10.1016/j.mlong.2009.06.005

Propos de Pr. Vukusic recueillis lors d'un entretien téléphonique.

Date de publication : Décembre 2022

7000040732-11/2022

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