L’ergothérapie, pour mieux vivre sa grossesse et bien se préparer à la
venue de l’enfant

Il est tout à fait possible aux femmes atteintes de sclérose en plaques d’avoir un ou plusieurs enfants. La grossesse n’a aucune conséquence sur l’évolution de la maladie et réciproquement. Elle doit néanmoins être anticipée et accompagnée avec le neurologue en raison de la nécessité d’arrêter ou de changer certains traitements de fond. Par ailleurs, en fonction des handicaps et des troubles présents, des adaptations et des apprentissages peuvent être nécessaires pour améliorer le bien-être pendant la grossesse, préparer l’accouchement et, ensuite, bien prendre soin de son enfant. C’est ce que permet l’ergothérapie.

Le point sur ce type d’accompagnement avec Maéva Guenot, ergothérapeute dans le service de médecine physique et de réadaptation fonctionnelle de l’Hôpital Saint-Philibert à Lomme.

L’ergothérapie, un accompagnement personnalisé

Désirer un enfant lorsque l’on vit avec la SEP est tout à fait naturel et normal. Mais pour que la grossesse se déroule au mieux et pour bien se préparer à l’arrivée de l’enfant, être accompagné par un ergothérapeute peut être très utile.

Qu’est-ce que l’ergothérapie ?

Les ergothérapeutes sont des professionnels de santé qui interviennent pour préserver ou maintenir de manière sécurisée, autonome et efficace les activités de toute personne, en fonction des handicaps qu’elle présente, de ses besoins et de ses souhaits.

« Notre cœur de métier est de faire en sorte que les personnes puissent continuer à avoir leurs occupations, celles-ci étant entendues au sens large, explique Maéva Guenot. Cela concerne autant les soins d’hygiène que les tâches domestiques, les déplacements, la vie sociale, le travail, etc. Nous prenons en compte l’ensemble des facteurs influençant les occupations : les aspects physiques et psychologiques, les valeurs, les croyances et l’environnement dans lequel évoluent les patients. Nous utilisons alors les forces de chacun d’entre eux pour compenser leurs points faibles et nous proposons des adaptations de l’environnement ou des manières de faire les choses. Nous sommes donc tout à fait en mesure d’informer, conseiller et orienter les femmes atteintes de SEP qui ont un projet de maternité ».

Répondre aux besoins de chaque femme

La sclérose en plaques est une maladie qui se présente et évolue de façon très diverse d’une personne à une autre. « En ergothérapie, il n’existe pas de réponse universelle, indique Maéva Guenot. Tout dépend du stade d’évolution de la SEP, des capacités et des limitations de la personne, de son environnement personnel et professionnel, de son projet. »

Lorsqu’une patiente exprime un désir de grossesse ou qu’elle est déjà enceinte, l’ergothérapeute se charge ainsi dans un premier temps de faire un bilan complet de sa situation. Il fait ainsi le point sur sa maladie et ses répercussions, ses conditions de vie, les ressources qu’elle peut mobiliser et celles qui lui font défaut. Il l’interroge également sur ses besoins et ses attentes vis-à-vis de la maternité.

À partir de ce bilan, l’ergothérapeute élabore un programme de prise en charge individualisé qui vise à proposer des solutions pour pallier toutes les difficultés qui peuvent ou pourront se présenter durant la grossesse, l’accouchement et après la naissance de l’enfant.

L’idéal est que l’ergothérapeute puisse intervenir dès le début de la grossesse, voire avant que l’enfant ne soit conçu, afin que la future mère soit la mieux armée possible dans toutes les situations qui vont se présenter à elle.

L’accompagnement en ergothérapie pendant la grossesse

Pendant les mois de grossesse, l’accompagnement de l’ergothérapeute peut porter sur plusieurs aspects.

Bien gérer la fatigue

La sclérose en plaques entraîne fréquemment une fatigue qui se manifeste de façon plus ou moins marquée au cours des journées et selon les périodes. La sensation de fatigue est souvent accrue pendant la grossesse, compte tenu des dépenses énergétiques induites par cette dernière.

Il importe dès lors de savoir se préserver et de s’accorder des moments de repos. Cela suppose de mettre en pratique le principe de « l’économie d’énergie » : faire ce que l’on a à faire en dépensant le moins possible son énergie.

Pour cela, l’ergothérapeute conseille sur l’organisation des journées, la définition de priorités, la répartition des diverses tâches et activités, les possibilités de délégation. Ceci en fonction des obligations et des souhaits de la patiente.

Adopter les bonnes postures

Au fur et à mesure des mois de grossesse et du développement du fœtus, le corps s’alourdit inévitablement. Cela peut accroître les éventuelles difficultés de déplacement et/ou les troubles associés à la SEP. Il est donc nécessaire d’adopter des postures adaptées pour limiter les répercussions du poids de l’enfant à venir. Lors des moments de repos, certaines positions sont ainsi conseillées : avoir les jambes relevées, prévoir un soutien lombaire, notamment. Pour la nuit et les siestes, il est préférable de se positionner sur le côté gauche, en utilisant un coussin pour caler le ventre.

« Si la patiente est en fauteuil roulant, la compression abdominale peut entraîner des troubles du transit ou des difficultés respiratoires, explique Maéva Guenot. L’ergothérapeute est en mesure de lui indiquer comment positionner son bassin, comment régler les repose-pieds et l’inclinaison du dossier, comment utiliser un coussin d’assise, etc. »

L’ergothérapeute peut également proposer des exercices adaptés d’étirement pour limiter les contractions du corps.

Adapter son environnement de vie

Dans la mesure du possible, le lieu de vie doit être adapté pour faciliter les déplacements et les gestes du quotidien. L’ergothérapeute fait part de conseils, en termes d’aménagement, de disposition des meubles et de matériels pour simplifier la vie de la patiente.

La préparation de l’accouchement

La préparation à l’accouchement est importante pour toute femme enceinte. Elle l’est d’autant plus avec la maladie, en fonction des répercussions de celle-ci.

« Il est essentiel que la patiente puisse avoir une posture tout à la fois adéquate et confortable pour permettre un accouchement par les voies naturelles, indique Maéva Guenot. L’ergothérapeute peut travailler avec la sage-femme et la patiente pour déterminer au préalable quelle est la meilleure position à adopter, en fonction des troubles présents. Nous faisons également le point sur le matériel spécifique qui peut être nécessaire. Certaines maternités, comme l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul qui fait partie du GHICL (Groupement Hospitalier de l’Institut Catholique de Lille) sont labellisés « maternité handicap » et proposent un accompagnement pluridisciplinaire gynécologique et rééducatif. »

Préparer la venue de l’enfant avec l’ergothérapeute

L’accompagnement de l’ergothérapeute tout au long de la grossesse permet également de préparer la future maman (ainsi que le futur papa) à l’arrivée de son enfant.

Anticiper sur le matériel nécessaire

En fonction des capacités et des limitations de la patiente, l’ergothérapeute peut définir un certain nombre de solutions possibles pour tous les soins qu’elle va devoir apporter à son enfant. Que ce soit pour les bains, les changes, les repas ou le sommeil, il peut être nécessaire d’aménager le lieu de vie et d’acquérir des matériels adaptés.

Ainsi, il faut tenir compte de l’accessibilité de la baignoire ou de la table à langer. Il convient également de disposer d’une chaise haute que la future maman puisse utiliser aisément. Pour le lit de l’enfant, différents dispositifs existent : ouverture latérale des barreaux ou lit qui s’accole à celui des parents avec un côté ouvert, par exemple. Les solutions proposées par l’ergothérapeute visent à permettre à la maman d’être dans le meilleur confort possible pour s’occuper de son bébé tout en assurant la sécurité de celui-ci.

Les bons gestes pour prendre soin de son enfant

Pour certaines femmes vivant avec une SEP, selon les handicaps et troubles qu’elles présentent, prendre son enfant dans ses bras, l’allaiter, le porter lors des déplacements peut être à l’origine de difficultés.

L’ergothérapeute est en mesure de conseiller ou d’apprendre les bonnes postures pour tous ces gestes de la vie quotidienne avec un bébé. « Nous sommes là pour que les futures mamans puissent jouer leur rôle de mère le plus pleinement possible et dans les meilleures conditions pour elles et leur enfant », explique Maéva Guenot.

Ne pas oublier les pères !

Dans le cadre d’un projet de maternité, l’ergothérapie ne s’adresse pas uniquement aux femmes atteintes d’une SEP. Les futurs papas qui vivent avec cette maladie peuvent eux aussi tirer profit à consulter un ergothérapeute.

Les conseils dispensés vont notamment concerner, en fonction de la situation individuelle de chaque patient, les postures, les gestes et les aménagements du lieu de vie. « Comme pour les mamans, notre approche pour les pères vise à les aider à prendre leur place et leur rôle auprès de leur enfant », précise Maéva Guenot.

Comment consulter un ergothérapeute

L’intervention d’un ergothérapeute peut faire partie de la prise en charge globale des patients atteints de SEP suivis dans un service hospitalier de neurologie ou de médecine physique et de réadaptation, ou encore dans un centre de rééducation.

Certains réseaux SEP proposent également les services d’un ergothérapeute. C’est le cas également de différents organismes médico-sociaux tels que les SAMSAH (Services d’Accompagnement Médico-Sociaux des Adultes Handicapés) et des SAVS (Services d’Accompagnement à la Vie sociale). Ces organismes peuvent être sollicités dans le cadre d’une demande d’aide formulée auprès de la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapée). En sachant toutefois que l’instruction des demandes par les MDPH est souvent longue ; il faut donc s’y prendre bien à l’avance.

Les ergothérapeutes exerçant en cabinet libéral sont par ailleurs de plus en plus nombreux. Il suffit alors de les contacter pour prendre rendez-vous, après avoir obtenu une prescription médicale.

Lorsqu’un ergothérapeute intervient dans le cadre d’une structure de prise en charge médicale ou médico-sociale, le coût est généralement pris en charge au titre de l’ALD (remboursement à 100% pour Affection de Longue Durée). En revanche, les consultations d’un ergothérapeute libéral ne sont pas remboursées par l’Assurance maladie. Mais certaines mutuelles proposent une prise en charge financière de ce type de soins.

Sources bibliographiques

1. Malapel H. Votre grossesse : un accompagnement pas à pas. Le Courrier de la SEP, n°138, février 2014.

Publié le : 12/11/2020

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