J'AI TESTÉ LA REMÉDIATION COGNITIVE

J'ai testé récemment la remédiation cognitive, autrement dit, la rééducation des troubles de l'attention et de la mémoire.

Cela a été dense, stimulant, intéressant mais aussi angoissant. Je vous fais vivre en live la première séance !

J'ai commencé fort en oubliant d'emblée le prénom du patient qui suit cette rééducation avec moi ! Lui avait oublié le mien : 1 partout… Je lui ai redemandé son prénom 5 minutes après en riant et ça a détendu l'atmosphère.

La séance correspondait au premier chapitre du livre d'Hélène Brissart, ProCOG-SEP, que je vous ai recommandé dans une chronique sur les troubles cognitifs. Elle portait sur le langage et la mémoration sémantique, grosso modo, la culture générale et le lexique. Le premier exercice était très facile et consistait à décrire les images que l'on voyait (une araignée, une médaille, un œil…). Ensuite, un alphabet était proposé et il fallait attribuer à chaque lettre un mot, avec une consigne : ne pas utiliser la même catégorie (par exemple, ne mettre que des noms de fruits et légumes ou d'animaux).

Exercice suivant : 26 définitions étaient proposées et il fallait trouver le mot qui leur correspondait, en respectant là encore une restriction, chaque réponse correspondait à une lettre de l'alphabet. Honnêtement, c'était amusant, nous échangions nos réponses à la fin et comme nous avions tous bloqué sur les mêmes définitions, parfois un peu tirées par les cheveux, c'était rassurant.

Les 2 neuropsychologues faisaient les exercices avec nous et j'avais l'impression d'être de retour en enfance et adolescence, quand nous faisions des jeux ou des « petits bacs ». Et justement, c'était l'exercice qui suivait ! Pour ceux qui ne connaissent pas, on choisit une lettre de l'alphabet et il faut trouver une ville, un pays, une fleur, un sport, un personnage, etc. C'était ludique donc…

Je ne fais jamais travailler mes neurones ainsi, de façon très spécifique. J'estime, à tort, que mon métier suffit à les entretenir et là, j'ai pu constater que travailler une fonction cérébrale très spécifique était intéressant et me faisait mobiliser davantage mon cerveau. En plus, le faire avec un autre patient et des spécialistes est beaucoup plus motivant : seule, je trouverais toujours une excuse pour ne pas suivre les exercices !

Nous avons aussi travaillé la flexibilité du cerveau, sa capacité à passer d'une tâche à un autre : il fallait donner un pays en A, une ville en A, un pays en B, une ville en B, jusqu'à Z.

Si nous en étions restés là, je vous aurais dit que c'était super, certes un peu contraignant (puisque je dois me rendre à l'hôpital une fois par semaine durant 3 mois) et très fatigant (je suis sortie vidée après une séance d'1 heure et demie, qui s'est terminée à 19 heures, heure à laquelle je suis déjà fatiguée en temps normal !). Cependant j'y avais trouvé un véritable intérêt et l'ambiance était ludique.

Quand le cerveau est vide...

Mais une des neuropsychologues a posé une question piège, qui n'était pas dans le livre : « Pouvez-vous vous souvenir des images que vous avez décrites en début de séance et en donner le plus possible ? ». Et là, le vide intersidéral, le blanc abyssal dans mon cerveau… C'était horrible, cela m'a replongé 4 ans en arrière lors de mon aphasie, (qui avait été associée à une hémiplégie) : je n'avais pas su répondre à la question « Donnez-moi 10 noms d'animaux » puisque j'en avais trouvé 2... C'était le dernier exercice, j'ai fait bonne figure tant que je n'étais pas seule mais je me suis effondrée dans le hall de l'hôpital : j'ai pleuré durant de longues minutes, sans pouvoir m'arrêter… Dans mes pleurs, se trouvaient pêle-mêle l'angoisse de ce que j'avais vécu il y a 4 ans, la tristesse d'être confrontée à mes limites intellectuelles, la crainte que mes troubles se majorent et mon ego qui prenait un coup dans l'aile à chaque fois.

J'avais beau savoir que mes troubles cognitifs étaient influencés par la fatigue, qu'à la fin de la séance j'étais épuisée, que je n'avais prêté aucune attention aux images au début, me contenant de les nommer machinalement, les larmes roulaient sur mes joues en continu… J'étais incapable de parler mais j'envoyais un email à quelques proches pour leur dire comment je me sentais. Au bout d'un moment, l'angoisse et la tristesse se dissipèrent, les pleurs avaient joué leur rôle : évacuer les émotions. Je me sentais vidée et épuisée ; une fois chez moi je me fis couler un bain, regardais vaguement un film et me couchais avec soulagement.

Le lendemain, j'ai relativisé l'événement de façon rationnelle, en me disant qu'il n'y avait rien de dramatique, que ce n'était pas une maladie d'Alzheimer. J'ai été de temps en temps triste mais j'ai verbalisé ce que je ressentais avec plusieurs personnes, ce qui m'a fait du bien. Je n'arrive pas encore à en rire, ce serait sans doute la clé pour prendre vraiment du recul et accepter ces troubles mais un jour, cela viendra… Et en attendant, je me répète que la remédiation cognitive est efficace et qu'elle me servira à améliorer mes troubles !

PS : je suis repartie avec des devoirs pour la prochaine fois. Retour à l'école !

Publié le : 19/08/2016 Mis à jour le : 29/03/2018

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