Accessibilité des transports en commun : quelles difficultés ? Quels axes de progrès ?

L'accessibilité des transports en commun est la condition sine qua none pour l'insertion socio-professionnelle et une vie personnelle épanouie. En 2020, elle reste toujours un sujet épineux et un obstacle de taille pour toutes les personnes en situation de handicap.

Les transports en commun, un parcours du combattant

« Quand je prends le bus, souvent la rampe qui permet de monter dans son fauteuil roulant fonctionne mal, voire pas du tout, et il faut attendre le prochain bus », déplore Eva, présidente de l'association Sep'avenir. « Pour le RER, l'ascenseur de ma gare en région parisienne est régulièrement en panne, donc on me demande d'aller dans une autre gare accessible, en bus ou un taxi. Ce qui ne veut pas dire qu'une fois arrivée sur place à Paris, la station soit adaptée avec des ascenseurs en état de marche. Enfin, une fois que tu as épuisé ces solutions, il reste Uber : mais en fauteuil, de nombreux chauffeurs annulent la course et passent devant toi, sans s'arrêter... »

Un véritable parcours du combattant pour se déplacer qui est hélas fréquent et c'est sans compter les incivilités... « Dans les transports, les conducteurs de bus sont parfois brusques et n’attendent pas que l’on se place pour démarrer. J’ai failli prendre la barre en pleine face dans le bus. Attention, nous sommes des personnes fragiles ! Certaines poussettes prennent la place des espaces dédiés aux fauteuils et certaines bagarres peuvent se créer car les parents refusent de plier les poussettes pour nous laisser la place. » Une expérience vécue par Mel, une patiente atteinte de SEP.

« À Paris, nous ne reconnaissons qu'une seule ligne accessible », déclare Patricia Sazi, directrice de l'Association des Paralysés de France à Agen. « Dans les grandes villes, comme Toulouse et Bordeaux, les transports sont plus accessibles car plus récents. Peu de patients ici prennent les bus (pour les difficultés citées ci-dessus), ils font plutôt appel aux transports adaptés à la demande mais il faut les commander. Pour que cela fonctionne, les circuits sont groupés et cela entraîne des ¼ d'heure en moins ou en plus, car on n'est pas sur un taxi individuel. »

« Avec ce type de transport, il y a trop de retard quand on doit arriver à une heure précise, pour un rendez-vous important », regrette Mel. Ce que confirme Guillaume Molinier, le directeur de la Ligue Française contre la Sclérose En Plaques, pour qui ces systèmes de minibus étaient une idée intéressante, mais ils ne sont pas assez performants. Cela ne permet pas à certains de maintenir l'activité professionnelle car ils sont trop en retard, ou trop en avance.

« C'est de la discrimination ! », conclut Eva. « Une personne en situation de handicap devrait avoir les mêmes chances et le même accès aux transports en commun qu'une personnes valide ».

Quels axes d'amélioration ?

  • Prendre en compte tous les handicaps

Guillaume énonce « l'accessibilité pour tous, doit prendre en compte tous les handicaps que ce soient les fauteuils, les cannes, le handicap invisible, le vieillissement, les blessés. Il faudrait aussi sensibiliser le public dans les métros et bus, en mettant de grandes affiches stipulant que les places ci-dessous sont pour les personnes handicapées, femmes enceintes, et personnes pour qui la position debout est pénible... ». Un avis que partage Mel, pour qui « les zones dédiées sont mal signalées à la RATP, qui devrait utiliser un logo imprimé sur le fauteuil comme en Allemagne. »

  • Entretenir et moderniser l'accessibilité...

Pour le directeur de la LFSEP, « l'accessibilité c'est bien, mais la maintenir c'est mieux ! C'est le véritable enjeu dans les années à venir. À la RATP par exemple, on fabrique des transports accessibles mais leur entretien n'est pas assez rigoureux pour que leur utilisation se fasse correctement. Idem pour la SNCF où certaines gares renvoient à d'autres gares parce que les équipements ne sont pas en état... Les entreprises doivent faire un effort d'audit permanent de leur réseau pour que les équipes techniques puissent intervenir. Elles devraient préciser au niveau des stations de bus quand y a un problème d'accessibilité. Pour le métro, les ascenseurs doivent fonctionner, et un salarié dédié devrait intervenir rapidement en cas de problème. »

« Si l'entretien du matériel est impératif, il faudrait aussi une évolution des technologies pour que le matériel soit moins fragile et plus fiable », analyse Patricia Sazi. « Le choix des véhicules est important : à Bordeaux par exemple, les palettes rétractables au niveau de la 2ème porte, sont dotés d'un système plus flexible que dans les bus traditionnels. Les chauffeurs doivent aussi être mieux formés à utiliser les rampes dans les bus »

  • Sensibiliser et financer les intercommunalités

Guillaume suggère que les collectivités locales, les mairies ont leur mot à dire et peuvent imposer des obligations d'accessibilité et d’entretien. « Ça pourrait faire démarrer un mouvement d'envergure nationale. Les maires pourraient s'engager à créer un groupe de travail sur l'accessibilité et un groupe d'audit pour chaque commune, ce serait un point de départ. »

« La véritable question est comment donner les moyens financiers aux intercommunalités (les métropoles et agglomérations) ? » s'interroge Patricia Sazi. « Car ce sont elles qui ont la charge d'absorber cette modernisation de nos réseaux et leur entretien... »

  • Réfléchir à d'autres idées

« Les associations pourraient mutualiser leurs efforts. Et au-delà des structures purement associatives, d'autres pourraient aussi s'engager, comme l'Agefiph, car le transport est une condition d'insertion professionnelle... », ajoute Guillaume.

Dernière idée évoquée dans une tribune du Parisien en date du 30 juin 2019, où Dominique Farrugia, atteint de SEP, et Benjamin Grisveaux, dénonçaient le manque d'accessibilité :

http://www.leparisien.fr/societe/dominique-farrugia-et-benjamin-griveaux-a-paris-seules-9-stations-de-metro-sont-adaptees-aux-personnes-a-mobilite-reduite-30-06-2019-8106402.php

À quand une application recensant tous les modes de transports, trajets et lieux accessibles aux PMR ou en situation de handicap, à laquelle usagers et associations pourraient contribuer ?

En attendant une amélioration de l'accessibilité, cette appli aurait au moins le mérite de faciliter la vie des personnes souffrant d'un handicap...

Publié le : 19/02/2020

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