Une maladie chronique comme la sclérose en plaques (SEP) peut bouleverser l’équilibre d’un couple.
Il s’agit de retrouver un équilibre à trois, avec la SEP, et non plus à deux. Comment mieux communiquer et éviter les sujets tabous ? Vous allez lire deux expériences de couple, radicalement opposées, qui donnent chacune des pistes de réflexion et d’amélioration.
« Notre couple n’a pas trouvé d’équilibre », déplore d’emblée Nicole, en couple avec Christophe depuis plus de 20 ans. « Il est victime de la maladie. Christophe a une SEP progressive invalidante depuis 2016 et le handicap se majore de façon marquée depuis quelques années. J’ai renoncé à mon couple mais il ne me viendrait pas à l’idée d’abandonner Christophe. »
Lorsqu’un diagnostic de SEP est posé, cela impacte à la fois la personne qui reçoit le diagnostic et son ou sa partenaire. Le couple doit alors s’adapter à la maladie, ce qui demande souvent du temps, énormément de communication mais aussi de remise en question et de capacité d’adaptation.
« Je cherchais quelqu’un qui me challenge mais qui puisse me comprendre quand j’ai besoin d’une pause », évalue Eva, qui a une SEP diagnostiquée tardivement en 2019. Elle a rencontré Vincent il y a 3 ans et il vient de lui faire sa demande en mariage à Venise.
Pour la personne malade, il est préférable d’être factuelle et d’informer de façon claire sur les symptômes et ses besoins. C’est indispensable pour mettre en place les ajustements dans la vie quotidienne. Le ou la partenaire doit, lui, écouter réellement, ne pas « présupposer » et poser des questions en cas de doute. Pour les 2 partenaires, un des écueils à éviter est probablement d’accorder trop de place à la SEP et à ses répercussions négatives et de ne pas hésiter à consulter une psychologue en cas de besoin.
La capacité d’adaptation est essentielle : la SEP, tellement imprévisible demande aussi à l’autre de s’adapter continuellement.
« Quand je suis en poussée ou si je ne me sens pas bien, il prend les devants pour préparer à manger », raconte Eva. « Il me temporise et me dit de me reposer pour que je récupère plus vite, en me reposant. Et en même temps, il est là pour me pousser à me dépasser. »
« Il n’y a jamais eu de sujets vraiment tabous parce que je n’aime pas ça », estime Eva. « Mais la douleur en a été un au départ parce que Vincent ne savait pas comment la gérer et voulait que l’on parte à l’hôpital d’emblée. Mais cela ne sert à rien, je me mets dans ma chambre et en méditation et je lui demande de respecter mon choix. Vincent s’est adapté, même si à certains moments ça lui fait mal de me voir souffrir.»
Vincent a dû apprendre à accepter peu à peu son impuissance, ce qui a été facilité par le fait qu’Eva est très proactive dans sa gestion de la maladie et fait tout ce qu’elle peut.
D’autres symptômes, comme les symptômes sexuels, urinaires ou ano-rectaux sont particulièrement difficiles à aborder. En plus d’une charge médicale adaptée, des conseils pratiques peuvent aider tout comme un travail sur soi. Une voie possible est de dédramatiser comme le fait Delphine, interviewée dans ce podcast. En cas de difficultés persistantes, une psychologue peut faciliter la gestion des symptômes difficiles et la communication à ce propos.
« Les premières années, notre vie, quotidienne et sexuelle, était équilibrée et nous parlions de tout sans tabou », raconte Nicole. La sexualité s’est arrêtée en 2018 quand il a eu une grosse poussée, moi un accident de l’épaule et un licenciement. Nous avons laissé tomber notre vie à 2, et nous nous sommes focalisés sur nos mal-êtres respectifs. Nous avons sans doute loupé le coche et je conseille de tout faire pour que jamais la maladie ne décide pour vous ! Nous avons subi la maladie, nous n’étions plus et ne sommes plus acteurs. »
Rien n’est gravé dans le marbre et il n’est jamais trop tard pour redevenir acteurs de la maladie et de son couple. A condition d’en avoir envie tous les deux, malgré les difficultés, et d’accepter de se faire aider si besoin, par un psychologue, psycho-sexologue ou thérapeute de couple.
« Nous fonctionnons toujours sur l’ancien format du couple, le sexe en moins », analyse avec justesse Nicole. « Il faut se donner le droit de parler, de souffrir, de se plaindre quand on est aidants. Et forts de tout cela, c’est peut-être plus facile de s’exprimer, d’avancer et de construire un nouveau couple, à deux, en composant avec la maladie... »
Il est en effet indispensable de s’adapter à une nouvelle dynamique du couple, où les rôles changent. L’acceptation, de part et d’autre, est indispensable pour cela. Elle demande du temps et de l’investissement.
Or la communication est un outil essentiel pour retrouver un équilibre au-delà des symptômes et des difficultés psychologiques.
« Dès le début, nous avons axé notre couple sur la communication », estime Eva. « Sexuellement, nous communiquons aussi et si nous avons des désaccords ou des envies différentes, nous en parlons et nous trouvons un terrain d’entente. »
Et en cas de conflit ? « Nous nous laissons redescendre chacun de notre côté parce que nous pouvons être colériques ! Chacun respecte si l’autre n’a pas envie de parler, puis nous perçons l’abcès suivant la méthode FETE. »
Le F signifie énoncer les faits, le E exprimer ses émotions et le TE trouver un terrain d’entente. A partir des mêmes faits, il peut y avoir 2 versions et 2 façons de les vivre et de les ressentir. Ce qu’il faut accepter en accueillant le ressenti de l’autre.
Nicole, elle, se heurte à un refus de parler et de consulter de la part de Christophe.
« Quand le handicap était moins marqué c’était beaucoup plus simple… », reconnaît Nicole. « La maladie a changé le corps du fait du handicap mais aussi la tête car Christophe est toujours en colère, notamment quand il est épuisé et qu’il a mal. Je le comprends mais comme il ne veut ni parler, ni partager, ni consulter, ça n’avance pas.»
En cas de refus de parler, la consultation avec un psychologue s’impose évidemment mais comme pour Nicole, ce n’est pas toujours simple. En parler d’abord à 3 avec le neurologue est un premier pas, qui pourra peut-être convaincre le malade. Puis consulter seul permet de savoir comment s’ajuster et souvent de faire bouger l’autre, en attendant une consultation de couple.
Retrouvez d’autres conseils sur le couple et la SEP dans la brochure consacrée à la vie affective, sexuelle et intime avec une SEP :
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Date de publication : 7000045550 - 03/2024