Observance dans la SEP : pourquoi et comment ?

L’observance pourrait se définir comme la concordance (parfaite, dans l’idéal) entre le comportement du patient et la prescription médicale1. Pourtant, il y a plus de 2000 ans déjà, Hippocrate décrivait le défaut d’observance des patients et s’en désolait. Pour certains, l’amélioration de l’observance serait même plus utile que n’importe quel progrès médical2,3.

Mais d’après l’OMS, dans les pays développés, la proportion de malades chroniques respectant leur traitement ne serait que de 50%3. La sclérose en plaques (SEP) n’échappe pas à cette règle.

Un vrai fléau pour la médecine

La non-observance peut paraître étonnante. Comment une personne peut-elle ne pas suivre les conseils qu'un professionnel lui propose pour son bien et sa santé ? Pourtant, c’est un fait : beaucoup de personnes ne suivent pas les prescriptions de leur médecin. C’est vrai pour des maladies dans lesquelles il n’y a pas ou que très peu de symptômes (ou très tardifs) comme le diabète ou l’hypertension, car le patient ne ressent aucun effet de la maladie à court terme. Mais cela peut être le cas aussi pour des maladies très douloureuses comme la goutte, et même dans des cas où l’arrêt du traitement peut lui être fatal (arrêt du traitement immunosuppresseur chez un greffé cardiaque). De nombreux chercheurs se sont penchés sur ce problème, menant à des raisons complexes et multiples.1

Dans un rapport de 2003, L'OMS a ainsi identifié cinq sources principales de mauvaise observance thérapeutique3.

  • Des facteurs liés au patient tout d’abord, comme les problèmes de mémoire, la crainte des effets secondaires ou les causes psychologiques (dépression…) et sociales,
  • Des facteurs dus à la maladie, comme la sévérité des symptômes ou les complications, qui altèrent les capacités des patients,
  • Des facteurs socio-économiques, comme l’âge, le niveau de formation ou encore le statut marital,
  • Des facteurs liés au traitement, avec notamment des schémas thérapeutiques trop compliqués, trop longs et bien sûr la survenue d’effets secondaires,
  • Pour finir, des facteurs liés au système de santé, portant sur la qualité des informations fournies au patient, de ce que l’on appelle « l’éducation thérapeutique », mais aussi sur la qualité de la relation entre la personne soignée et le soignant qui la prend en charge (confiance, écoute, partage…).

La mauvaise adhérence à un traitement est ainsi loin d’être un simple « problème de patient » et c’est bien à l’ensemble de ces facteurs qu’il faut s’attaquer pour améliorer l’observance.3

Un phénomène comparable dans la SEP

Comme on pouvait s’y attendre, dans la SEP, la situation n’est guère différente.
En effet, comme dans un certain nombre de maladies chroniques, les traitements de fond utilisés dans la SEP peuvent avoir leurs limites quant à l’amélioration du quotidien des patients, notamment sur certains symptômes neurologiques sévères déjà installés avant le début du traitement.

Dans une revue publiée en 2021 et compilant 349 études réalisées chez des personnes suivies par un traitement de fond, les taux d'adhésion globaux étaient très variables, d’à peine 52% à un très honorable 92,8%. Une analyse plus fine a révélé que les facteurs les plus importants jouant sur l’adhérence au traitement étaient l'âge, le sexe, l’existence ou non d’une dépression, l’état cognitif, la satisfaction ou non par rapport au traitement, l’existence de réactions au site d'injection et l'anxiété liée à l'injection.

Malheureusement, cette mauvaise adhésion au traitement réduit son efficacité clinique, ce qui peut avoir un impact négatif sur la maladie et augmenter les hospitalisations liées à la SEP.4 Les traitements de fond ont en effet une activité reconnue, ils diminuent l’activité inflammatoire de la SEP afin de réduire la progression du handicap.4

Des études sur l’observance des traitements de la sclérose en plaques ont montré que le bénéfice des traitements diminue en fonction du nombre d’oublis des prises. Ainsi on a pu observer un sur-risque de 30% de poussées sévères et d’hospitalisations chez les personnes oubliant de plus de 50% leur traitement, par rapport à ceux qui prennent plus de 90% de leur traitement5. Il est donc très important non seulement de prendre son traitement, mais aussi de le prendre régulièrement pour ralentir la progression de la maladie.

Des pistes à explorer

  • Pour les oublis, des applications sont disponibles, qui peuvent aider à une meilleure observance en créant des alertes automatiques pour la prise des traitements, pour le renouvellement de la boîte de médicament ou encore pour rappeler les rendez-vous de consultation.2
  • L’éducation thérapeutique est primordiale. Pour se soigner, la personne prenant le traitement doit savoir ce qu’elle doit faire et comment le faire. Elle doit acquérir des connaissances et des compétences. Il ne faut pas hésiter à se renseigner et à solliciter des conseils et des explications auprès des professionnels de santé mais aussi des associations de patients, dont l’aide et le soutien sont précieux. Ces explications sont très importantes pour acquérir la conviction que le traitement est efficace mais aussi que l’on est capable de le mettre en œuvre. Petit à petit, ces convictions vont faire naître le désir de faire, et de faire bien.1
  • La crainte des effets secondaires du traitement ne doit pas être un point de blocage. Il est parfois possible de les limiter ou de les contrôler, il ne faut donc pas hésiter à en parler à son médecin ou pharmacien. Et surtout, il faut garder à l’esprit que c’est contre la maladie qu’il faut lutter.1

L’échange avec le médecin ou l’infirmière référente sont essentiels. Il faut pouvoir aborder avec eux tous les points qui restent obscurs, toutes les questions qui surviennent ou encore ne pas hésiter à discuter de l’opportunité de changer vers un traitement qui convient mieux à vos habitudes. De plus en plus de spécialités sont disponibles, avec des formes d’administration très différentes.
Il est ainsi important de garder en mémoire que le traitement apporte un réel bénéfice et que le meilleur moyen de lutter contre la progression de la maladie est en fait de respecter le protocole thérapeutique proposé, avec l'aide des soignants et de son entourage.

Pour aller plus loin

Sources:

  1. Reach G. Can we improve treatment adherence in patients with chronic disease? Bioethica Forum. 2014 ; 7 (3) : -90-97.
  2. Postel-Vinay N. et coll. Observance et nouvelles technologies : nouveau regard sur une problématique ancienne. Médecine/sciences 2018 ; 34 : 723-9.
  3. WHO. Adherence to long-term therapies : Evidence for action. https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/42682/9241545992.pdf;jsessionid=14B61FC8683B0591F1380360EBFC9C5E?sequence=1
  4. Washington F. et al. Factors affecting adherence to disease‑modifying therapies in multiple sclerosis: systematic review. Journal of Neurology. 2022; 269:1861–1872.
  5. Lizán L et al. Treatment adherence and other patient-reported outcomes as cost determinants in multiple sclerosis: a review of the literature. Patient Prefer Adherence. 2014 Dec 4; 8: 1653-64. doi: 10.2147/PPA.S67253. eCollection 2014. Review.

En savoir plus :

  1. Éducation Thérapeutique

Date de publication : Novembre 2022

7000040404-11/2022

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